jeudi 23 juin 2011

Je me souviens

Regards sur l'histoire, sur une époque où notre pays était le Bas-Canada.
C'était en 1839.

Testament politique de Chevalier de Lorimier


« Je meurs sans remords. Je ne désirais que le bien de mon pays dans l’insurrection et l’indépendance, mes vues et mes actions étaient sincères et n’ont été entachées d’aucun des crimes qui déshonorent l’humanité et qui ne sont que trop communs dans l’effervescence de passions déchaînées.

« Depuis 17 à 18 ans, j’ai pris une part active dans presque tous les mouvements populaires, et toujours avec conviction et sincérité. Mes efforts ont été pour l’indépendance de mes compatriotes; nous avons été malheureux jusqu’à ce jour. La mort a déjà décimé plusieurs de mes collaborateurs. Beaucoup gémissent dans les fers, un plus grand nombre sur la terre d’exil avec leurs propriétés détruites, leurs familles abandonnées sans ressources aux rigueurs d’un hiver canadien.

« Malgré tant d’infortune, mon cœur entretient encore son courage et des espérances pour l’avenir, mes amis et mes enfants verront de meilleurs jours, ils seront libres, un pressentiment certain, ma conscience tranquille me l’assurent.

« Voilà ce qui me remplit de joie lorsque tout est désolation et douleur autour de moi. Les plaies de mon pays se cicatriseront après les malheurs de l’anarchie et d’une révolution sanglante. Le paisible Canadien verra renaître le bonheur et la liberté sur le Saint-Laurent; tout concourt à ce but, les exécutions même, le sang et les larmes versés sur l’autel de la liberté arrosent aujourd’hui les racines de l’arbre qui fera flotter le drapeau marqué des deux étoiles des Canadiens.
...

« Quant à vous, mes compatriotes, puisse mon exécution et celle de mes compagnons d’échafaud vous être utiles. Puissent-elles vous démontrer ce que vous devez attendre du gouvernement anglais!... Je n’ai plus que quelques heures à vivre, mais j’ai voulu partager ce temps précieux entre mes devoirs religieux et ceux dus à mes compatriotes : pour eux je meurs sur le gibet de la mort infâme du meurtrier, pour eux je me sépare de mes jeunes enfants et de mon épouse sans autre appui, et pour eux je meurs en m’écriant: Vive la Liberté, Vive l’indépendance! »

Chevalier de Lorimier
14 février 1839, à 11 heures du soir


Extrait du livre « Les patriotes 1830-1839 »
Les Éditions Libération, 1971.

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