dimanche 6 janvier 2013

Le Québec sur la scène mondiale

Au début de décembre 2012, l'Assemblée nationale du Québec a adopté sans opposition une motion reconnaissant le droit des Palestiniens à l'autodétermination et à la création d'un État ainsi que le droit d'Israël de vivre en  paix à l'intérieur de frontières sûres et reconnues. Cette position est - en principe bien sûr - similaire à la position « officielle » du Canada mais son affirmation par l'Assemblée nationale, sur proposition de Jean-François Lisée et Amir Khadir, constituait une claire dénonciation du vote canadien contre l'admission de la Palestine à l'ONU à titre d'observateur et des durs propos tenus après le vote par le ministre des Affaires étrangères John Baird.

Semblant faire fi de sa propre politique dans le conflit israélo-palestinien, officiellement favorable à la solution des deux États, le Canada faisait partie du groupe de neuf pays qui ont voté contre l'octroi du statut d'État non-membre observateur à l'ONU. Le gouvernement Harper, inconditionnellement pro-Israël par les temps qui courent, avait même tenté d'intimider les Palestiniens, les menaçant de représailles diplomatiques et financières s'ils poursuivaient leur démarche d'admission aux Nations Unies. La motion du Québec, destinée à la planète entière, disait en quelque sorte qu'ici, il n'y a pas unanimité sur cette question et qu'à l'intérieur même de la fédération canadienne, la nation québécoise est plus ouverte qu'Ottawa aux demandes somme toute modérées des Palestiniens.

Ce qui est intéressant dans cette histoire, ce n'est pas tellement le degré de différence entre la position d'Ottawa et celles des parlementaires québécois, mais le fait que le Québec, en tant que peuple, en tant que nation, puisse avoir des opinions « internationales » qui lui sont propres et qu'il n'existe aucun forum officiel, autre que l'Assemblée nationale, où elles puissent être exprimées. La diplomatie demeure un pouvoir que le gouvernement fédéral partage le moins possible avec les provinces et il n'y a pas vraiment d'instance fédérale-provinciale ayant pour mandat principal de discuter régulièrement de relations internationales au sens large.

Et même si telle instance existait, le problème se poserait toujours : le Québec y serait comme d'habitude une province sur dix, alors qu'on sait, en réalité, qu'il est représente aussi une nation. À cet égard, il incarne le coeur de la composante francophone de la dualité canadienne, il est un sur deux, et il n'est pas dit que ses intérêts, politiques, économiques ou culturels soient toujours les mêmes que ceux de la nation anglo-canadienne. L'expression « les deux solitudes » n'évoque pas une situation fictive. Sondage après sondage, élection après élection, les différences collectives se manifestent.

Un des plus grands défauts de la fédération canadienne, c'est justement l'incapacité de permettre à cette dualité de s'exprimer, tant au niveau fédéral qu'au palier international. Et la possibilité que cela survienne un jour semble plus que faible, du moins présentement. Et pourtant, sur le plan des principes constitutionnels, rien ne s'oppose à la mise en place de solutions novatrices qui permettraient au Québec d'occuper une compétence élargie sur la scène mondiale. On n'est pas obligé de briser le pacte fédératif pour permettre à la nation francophone du pays de développer encore davantage un rôle international que le Québec bonifie déjà depuis la Révolution tranquille.

Il suffit de rappeler, à cet égard, que l'Ukraine et la Biélorussie avaient chacune eu droit à un siège aux Nations Unies à l'époque où elles étaient des États membres de l'URSS, qui avait comme le Canada une structure fédérative. Le précédent existe donc : un État membre d'une fédération peut siéger à l'ONU. On pourrait aussi s'inspirer de la constitution belge, où les communautés française et flamande ont chacune le droit constitutionnel, en matière de coopération internationale, de conclure des traités avec d'autres pays.

Sur le plan sportif, on peut aussi penser à Porto Rico et Hong Kong, qui sont encore moins souverains que le Québec mais qui ont des délégations aux Olympiques. Pourquoi le Québec ne pourrait-il pas en faire autant?

Il y a plus de 50 ans, en 1961, Pierre Elliot Trudeau écrivait au sujet du Québec dans Cité libre : « Ouvrons les frontières ! Ce peuple meurt d'asphyxie ! » Évidemment, il dénonçait à cette époque le Québec replié sur soi de l'ère Duplessis et proposait une ouverture sur l'ensemble du Canada. L'ouverture qu'il souhaitait s'est produite et pourtant, ses paroles restent actuelles. C'est la fenêtre sur le monde qu'il faut désormais ouvrir plus grande.





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